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15 mai 2009 5 15 /05 /mai /2009 07:26
L'idée qu'on se fait généralement du Népal est souvent celle d'une expérience mystique. Si se sentir déconnecté du reste du monde et perdre tous ses repères est mystique, alors je suis en plein dedans.

Déconnecté du reste du monde, je le suis tout d'abord de façon concrète et réelle au quotidien.

Par la distance premièrement. Je suis à l'autre bout de mon monde, coincé entre l'Inde et la Chine au pieds de l'Himalaya. C'est loin en titi comme dirait l'autre.

Déconnecté par les pannes d'électricité généralisées ensuite. Essayez de vivre sans électricité, ni téléphone, ni internet durant plusieurs jours. Impossible de communiquer avec qui que ce soit sauf les gens autour de nous.
Il n'y a pas eu d'électricité à Katmandou durant 48 heures et c'est revenu seulement à 22h45 hier soir.
Et lorsqu'il y a du courant, internet est d'une lenteur exaspérante... ça c'est quand ça fonctionne.

Deux ou trois soirées complètes dans le noir et tout d'un coup on se sent bien loin du reste du monde.
 

Déconnecté surtout par la perte de mes repères. Rien ici n'est comparable à ma vie habituelle : la langue, la nourriture, l'habillement, l'hygiène, l'aménagement urbain, la circulation, la poussière, la météo, la religion, l'histoire, les rapports entre les gens... et j'en passe.

Au début, tout ça est exotique, à la fois un peu amusant et un peu dérangeant. Mais la nature humaine étant ce qu'elle est, on finit par s'adapter à ces nouvelles conditions assez rapidement tout de même.
  Je suis même étonné de commencer à trouver que ça sent bon dans cette ville grâce aux odeurs de nourriture, d'épices et d'encens qui flottent un peu partout dans Katmandou.

Lorsque je marche dans ces rues moyenâgeuses, parmi ces gens si différents de moi, vivant dans des conditions si différentes des miennes et que je commence à trouver ça normal d'être parmi eux, j'ai soudain un malaise. Je crains même un peu de trouver ça difficille de retrouver mes repères au retour tellement je vis déconnecté de ce qu'a été ma vie jusqu'à maintenant.

Dans cet état d'esprit, j'ai un peu de difficulté à vous raconter ce que je vois comme une simple chronique touristique. Ça vient tellement me chercher loin que je me demande parfois si je suis bel et bien là, si c'est bel et bien moi derrière ces yeux qui voient ces choses là. Je vais tout de même essayer de vous raconter ça le plus simplement possible mais je crains de ne pas pouvoir bien illustrer le fonds de ma pensée. Allons y tout de même.

Par exemple, cet après-midi j'avais à mon agenda de visiter deux sites classés au patrimoine mondial de l'Unesco dans la vallée près de Katmandou. Je me rend donc à quelques coins de rue de mon guesthouse, trouvant ça tout à fait normal de marcher en gougounes dans la rue boueuse (c'est le début de la saison des pluies ici), au travers des passants, des klaxons et de la circulation anarchique. Tout ça pour trouver un taxi. Je négocie le prix pour 200 roupies et j'embarque dans une boîte à savon finie, me rappelant ma Toyota Corolla 1971 toute rouillée et dont on voyait la rue au travers du plancher. Commence alors une course ridiculle dans un labyrinthe de rues si étroites qu'on se demande comment c'est possible d'y circuler, surtout à cette vitesse.

J'arrive donc à Pashupatinath, temple hindouiste le long de la rivière sacrée Bagmati et qui a pour particularité d'être le lieu où les gens vont incinérer leurs morts. Il y a des dizaines de promontoires le long de la rivière, des "ghats" et c'est sur ces ghats que s'effectue la crémation. La famille arrive avec le corps du défunt sur un brancard de bambou qu'ils ont fabriqué pour l'occasion et qu'ils pont trimballé dans la ville pour arriver là. Le défunt est tout coloré, fleuri et enguiralndé et la première étape consiste à jeter ces fleurs à la rivière. On dépose ensuite le corps sur un bûcher (liitérallement des bûches de bois empilées pour former un lit funéraire) et on recouvre le corps de paille.
  La tâche revient au fils ainé de mettre le feu au corps de son parent et ça brûle comme ça durant 3 heures. Finalement, les cendres sont poussées dans la rivière sacrée pour faire place à une autre cérémonie de crémation.
J'ai dû en voir une bonne dizaine en l'espace d'une heure ou deux.

Et moi je suis là à regarder ça, dans un temple religieux vieux de plus de mille ans, entouré de singes et de sâdhus.
Ce sont de saints hommes maquillés comme des clowns, qui en sont rendu à leur dernière réincarnation et qui ont le droit de fumer du pot pour mieux méditer à temps plein.  
J'essaie de comprendre et de trouver ça normal.
  Par la suite, je pars à pied dans la montagne et je marche une heure au travers de la campagne et d'un village pour rejoindre Bondhnath, là où est construit l'un des plus grands stupa du monde.
Il paraît même que ce temple contiendrait des reliques du vrai Bouddha décédé il y a environ 2 500 ans mais personne ne peut le prouver.

Bref, en marchant dans ces rues, en voyant tous ces gens qui me dévisagent et en réalisant que tout ça ne pouvait pas être normal pour moi, je me suis senti tellement déconnecté de ma réalité une fois de plus.

Rendu sur place, un professeur d'université Népalais, qui a eu l'occasion de voyager un peu dans le monde et qui édite maintenant un magazine plutôt sérieux sur l'avancement de la condition népalaise et des droits de l'homme, veut tout savoir de moi pour en faire un article. Il ne comprend pas qu'un type comme moi puisse partir sans sa famille aussi longtemps, sans travailler et trouver que ça ne coûte pas cher vivre ici. Il cherche un sens à ce que je fais pour le partager avec ses lecteurs.Il veut savoir ce que je pense de la paix et comment y arriver. Je lui promet de lui faire parvenir une photo pour son article et lui offre de partager mon taxi pour retourner à Katmandou sous la pluie battante. Rendue à mon guesthouse, je sens l'émerveillement dans ses yeux de se trouver devant un si bel endroit pour lui. Je remarque ses vêtements usés et ses dents finies. Je réalise qu'il est à peine un peu plus vieux que moi et qu'il est un érudit. C'est ce que j'aurais peut-être l'air si j'étais né ici. Nous nous sommes salué avec des namaste.

Je ne sais pas si vous voyez ce que j'essaie d'illustrer. D'un côté, je me sens tellement déconnecté de tout ce que je connais et de l'autre, je suis au Népal comme un poisson dans l'eau. Comme si c'était normal tout ça.

Je sais, c'était un peu comme ça dans plusieurs autres pays étrangers que j'ai visité jusqu'à maintenant mais, pour une raison que j'ignore, il y a quelque chose qui vient me chercher plus qu'ailleurs au Népal et c'est ce que j'ai essayé de partager avec vous.

Il n'y a d'ailleurs pas que le mysticisme au Népal, il y a surtout des paysages uniques au monde. Les gens se déplacent du monde entier surtout pour y faire un peu de trekking dans ces montagnes. N'étant pas bien équipé pour ça, j'ai abandonné cette idée. Mais ça ne m'empêchera pas d'aller coucher au sommet d'une montagne demain soir afin d'appercevoir la chaîne de l'Himalaya au lever du soleil.

Namaste

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moiFaire le tour du monde en sac à dos à 50 ans, c'est possible. Conseils, anecdotes et autres souvenirs de ce long voyage autour du monde réalisé en 2009 et des autres voyages qui ont suivi.

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